Le gène Notch, accélérateur de la cancérogenèse colorectale

L'équipe du Pr Daniel Louvard, directeur de recherche CNRS et directeur du Centre de Recherche de l'Institut Curie, en étroite collaboration avec celle de Spyros Artavanis-Tsakonas, vient de découvrir le rôle du gène Notch dans l'initiation du processus tumoral conduisant aux cancers du côlon. Les gènes Notch et Wnt sont des acteurs clés de la signalisation cellulaire intestinale. Ils assurent le développement et l'organisation normale de l'intestin.

L'activation anormale et simultanée de ces deux voies de signalisation augmente de plus de vingt fois le nombre de tumeurs bénignes - des adénomes - dans l'intestin des souris par rapport à l'altération seule de la voie Wnt. Par ailleurs, ces tumeurs se développent de façon spectaculaire dans le côlon, mimant ainsi la physiopathologie observée chez l'homme. L'action couplée de ces deux voies crée l'environnement propice à la transformation tumorale des cellules. Au vu de cette étude, publiée en ligne dans PNAS, le gène Notch se révèle être un - accélérateur - indispensable à la formation des tumeurs colorectales chez l'homme. Reste à découvrir le frein pouvant contrecarrer l'action de ce gène.

L'intestin se renouvelle en permanence ; moins de 5 jours sont nécessaires pour - refaire à neuf - l'ensemble de l'intestin qui, déployé a une taille équivalente à celle d'un court de tennis quand il se joue en double. Ce mécanisme repose sur la présence de cellules souches et de cellules progénitrices, au creux des villosités intestinales.

Les cellules souches donnent naissance aux cellules progénitrices, relativement indifférenciées, mais susceptibles, par des divisions successives, d'engendrer les différents types de cellules présentes dans l'intestin. Tout l'art est de maintenir l'équilibre entre différenciation et prolifération au sein des villosités intestinales.

Les gènes Notch et Wnt sont des acteurs clés de la signalisation cellulaire assurant cette stabilité, et à ce titre, garantissent le développement et l'organisation normale de l'intestin. Ces deux gènes agissent sur la prolifération et la différenciation des cellules souches au sein du tissu intestinal. En amont de la voie de signalisation Wnt se trouve le gène APC, dont l'altération est souvent décrite comme initiatrice de la cancérogenèse colorectale. C'est une mutation d'une des deux copies de ce gène suppresseur de tumeur qui est par ailleurs à l'origine des polyposes adénomateuses familiales, caractérisées notamment par l'apparition dans le côlon de centaines, voire de milliers de polypes dès l'adolescence. Cette pathologie est responsable de 1 % des cancers colorectaux.

L'équipe du Pr Daniel Louvard, en étroite collaboration avec celle de Spyros Artavanis-Tsakonas, vient de montrer que les gènes Notch et Wnt agissent de concert pour perturber la prolifération des cellules progénitrices dans l'intestin. Dans les modèles animaux où la voie Wnt est activée en permanence, l'activation de Notch accélère et augmente de manière spectaculaire la formation des tumeurs dans l'intestin, et tout particulièrement dans le côlon. Or cette région est habituellement peu concernée par la survenue de tumeur dans les modèles de souris, contrairement à ce que l'on observe chez l'homme. L'apparition de nombreux adénomes dans le côlon de souris mime ainsi la physiopathologie observée chez l'homme.

Cette synergie entre les gènes Notch et Wnt a été retrouvée dans des modèles animaux distincts, ce qui prouve que ce mécanisme est conservé au cours de l'évolution.

Le Pr Daniel Louvard précise que - le gène Notch agirait tel un accélérateur de la cancérogenèse colorectale. Son activation entraîne une augmentation de la division des cellules et en conséquence un accroissement des risques d'apparition de mutations. -

Or, le cancer résulte d'une succession d'accidents génétiques. Les altérations des gènes Notch et APC créent un environnement propice et indispensable à l'accumulation des erreurs génétiques conduisant aux cancers colorectaux. L'action couplée des gènes Notch et Wnt participe aux toutes premières étapes de la formation de la tumeur au stade où l'on parle encore de polype et où le dépistage revêt toute son importance.

Ces connaissances sur les mécanismes du développement des cancers vont maintenant permettre de progresser dans l'identification de nouvelles cibles thérapeutiques.


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Publié le 17-03-2009




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