Les femmes supérieures ? certains tests neuropsychologiques

Le chercheur Olivier Collignon et ses collègues du Centre de recherche en neuropsychologie et de l'Université de Montréal (CERNEC) ont démontré que les femmes étaient supérieures aux hommes dans le traitement des informations émotionnelles émanant de sources auditives, visuelles et audio-visuelles. Les émotions à l'étude étaient la peur et le dégoût.

La supériorité des femmes dans ce type de tâches neuropsychologiques était déjà reconnue de façon intuitive, mais les études empiriques avaient jusqu'à maintenant produit des résultats inconsistants. Pour cette étude, des modèles vivants, soit des acteurs et des actrices, ont été utilisés pour simuler la peur et le dégoût, plutôt que de simples photographies. Les mouvements faciaux jouent un rôle important dans la perception de l'intensité d'une émotion et stimule différemment les zones du cerveau impliquées dans le traitement de ces informations, explique Olivier Collignon, qui est aussi chercheur à l'Institut de neuroscience à l'Université catholique de Louvain en Belgique. L'étude a aussi mis l'accent sur l'utilisation de stimuli bimodaux : une expression faciale animée jumelée à une voix non verbale.

L'équipe de chercheurs a demandé aux participants de l'étude, 23 femmes et 23 hommes âgés de 18 à 43 ans sans problèmes neurologiques ou psychiatriques, d'identifier l'émotion de la peur et du dégoût le plus rapidement possible par la présentation d'un stimulus auditif, d'un stimulus visuel, d'un stimulus audio-visuel congruent et, finalement, d'un stimulus audio-visuel non congruent, par exemple un visage de peur jumelé à une voix de dégoût, et vice versa.

Les femmes différencient plus facilement le dégoût de la peur

Une performance générale supérieure frappante chez les femmes est ressortie des résultats. De plus, les résultats étaient meilleurs lorsqu'une actrice exprimait les émotions plutôt que ceux obtenus lors des prestations des acteurs.

Non seulement les femmes traitent plus efficacement l'information émotionnelle unisensorielle (expression faciale ou voix), mais sont aussi plus efficaces pour traiter l'intégration de la voix et de l'expression faciale.

Pourquoi la peur et le dégoût plutôt que la joie et le plaisir ?

Les émotions de la peur et du dégoût ont été privilégiées dans cette étude, car elles ont des fonctions de prévention dans les situations menaçantes et sont donc liées à la survie de l'espèce humaine.

Compétition cérébrale entre femme et homme?

Le but de ce genre d'études n'est pas de prouver la supériorité de l'homme ou de la femme, contrairement à ce que certains pensent, souligne Olivier Collignon. Ces études inter genres sont nécessaires pour aider les chercheurs à mieux comprendre les maladies mentales qui ont une composante inter genre importante, c'est-à-dire qui affectent différemment les hommes et les femmes. Un bon exemple de cela est l'autisme, qui affecte beaucoup plus d'hommes que de femmes et dont l'une des caractéristiques est la difficulté à reconnaître l'expression des émotions.

L'autisme et les émotions

Les chercheurs Baron et Cohen ont mis de l'avant en 2002 une théorie provocante selon laquelle l'autisme pourrait être l'exacerbation du cerveau masculin. Ils ont suggéré que l'autisme et le syndrome d'Asperger seraient l'extrême pathologique du comportement cognitif et interpersonnel mâle, caractérisé par une capacité d'empathie plus limitée et une systématisation accrue. Nos résultats de recherche démontrant que les hommes identifient et expriment les émotions moins efficacement renforce, du moins en partie, cette théorie, reconnaît Olivier Collignon.

Origines des différences entre homme et femme

Les femmes sont-elles programmées ainsi dès la naissance ou est-ce le résultat de l'expérience de vie? Le fait que certaines différences sont décelables très tôt chez l'enfant alors que les expériences de socialisation sont peu nombreuses laisse croire que la biologie ait un rôle à y jouer. La psychologie de l'évolution propose comme hypothèse que la femme est dotée de cette disposition biologique à traiter plus efficacement l'information émotionnelle en tant que mère prodiguant les soins aux nouveau-nés et aux enfants en bas âge : elle peut ainsi décoder rapidement la détresse d'un enfant qui ne parle pas encore ou d'un adulte menaçant, augmentant les chances de survie de sa progéniture. Cela ne doit pas occulter le rôle important de la culture et de la socialisation dans cette différence inter genre, prévient cependant Olivier Collignon.

Cette étude sera publiée sous peu dans l'édition papier de Neuropsychologia et elle peut déjà être consultée dans l'édition Web. Elle a été financée par le Fonds de recherche en santé du Québec, le Programme de chaires de recherche du Canada, les Instituts de recherche en santé du Canada et le Conseil de recherche en sciences naturelles et en génie du Canada.

Les co-chercheurs de l'étude sont Simon Girard, Frédéric Gosselin, Dave Saint-Amour, Franco Lepore et Maryse Lassonde.


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Publié le 24-10-2009




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